01 Jan Lune et fitzcarraldies
Les débuts d’années ont l’air dégagé des horizons lavés, cet air à la fois pimpant et engourdi des fêtes auxquelles on arrive en avance, l’aplomb facile des pistes encore vides où l’on attend que la musique commence en espérant que celle-ci ne soit pas une variation sur les thèmes de l’année écroulée mais qu’elle vibre autrement, plus accordée, plus vive, plus inventive, plus large et à un autre diapason.
Mes premières notes seront pour le long-métrage d’animation « La jeune fille sans mains », tiré d’une terrible nouvelle des frères Grimm et réalisé par Sébastien Laudenbach qui aura eu la folie de se lancer seul dans cette entreprise démesurée, faisant de lui un Fitzcarraldo du cinéma d’animation.
Autre Fitzcarraldo : Florent Trochel qui continue de creuser son beau sillon malgré la surdité d’un monde théâtral encore trop souvent assis dans le confort du répertoire ou préférant les auteurs poids lourds aux nouvelles plumes. Après « Démangeaisons de l’oracle » et « Montagne 42 » j’entame la composition musicale de sa nouvelle pièce « Nourrir la lune ».
Le 15, une ascension vers le bien-aimé Monte-en-l’air (Ménilmontant) pour accompagner l’Hannibal writer Claro dans les Alpes brûlantes de son grand poème «Comment rester immobile quand on est en feu ?». À un kilomètre plus au sud, dans cet accueillant vingtième, élephanthoms et autres oisillons chauves sourient car leur exposition au sein de la Rational Gallery est prolongée d’un mois Chez Betty.
Ce mois lunaire se terminera dans le rêve de Madame Lune qui nous a rassemblé avec Rosemary Standley, Géraldine Martineau, Anne Gouverneur, Maëva Le Berre, Nicolas Repac, Simon Dalmais, Nicolas Martel et une kyrielle d’invités dont Kyrie Kristmanson, Piers Faccini ou Hugh Coltman pour concocter l’objet onirique «On a dit…» qui sera posé le 18 au Théâtre du Nord à Lille et du 26 au 30 à la Philharmonie de Paris.
Après avoir prêté main forte à ces vivifiantes fitzcarraldies, je m’en retournerai aux miennes. En attendant, je vous offre trois friandises pour voyager dans le temps : L’une est de menthe cuivrée, truffée de grand air et enrobée de lumière rasante, elle annonce le futur album du duo avec Régis Boulard, NO&RD. L’une est un opaque flan de durian, sombre et pourpre, elle annonce le futur album phobique du duo avec Marc Sens. L’une est une douceur jusqu’ici gardée secrète, elle nous ramène trois ans en arrière avec le film «How we tried a new combination of shade» de Dan Ramaën, une autre façon de déguster la pièce symphonique qui a présidé à ce bijou. La clé du coffre est chan4id6ay
Quand le monde s’endort, ce morceau de terre illuminé qu’est la lune reflète ce que l’on a perdu. En regardant vers le haut, en restant liés à cette part éloignée de nous-mêmes, nous brillerons différemment. Belle année.
Olivier Mellano
